RETRO-CHRONIQUE (1990). Si vous cherchez un chaînon manquant entre The La’s et The Stone Roses, ou The Dream Academy et Oasis, ce premier album « oublié » d’une formation mancunienne méconnue vaut le détour et pourrait bien devenir votre disque de chevet pour un sacré bout de temps.
... C'EST QUI CE GROUPE ?
Une petite bande de "wankers" de Manchester qui avaient/ont toujours la grâce... En 1989, John Matthews, chanteur des oubliés ou carrément inconnus Turning Blue convainc un ex des Stones Roses, le guitariste Andy Couzens, et deux autres égarés, Simon Davies à la basse, et Chris Goodwin à la batterie (vaguement aperçu chez les Inspiral Carpets) de monter un nouveau groupe. Un contrat en poche, la formation se fait plus ou moins remarquer avec trois singles qui viennent "toquetoquer" aux portes du Top 50 britannique. Sans jamais vraiment casser la baraque. Le lumineux Box Set Go n'ira pas plus loin que la 26ème place. Néanmoins, le groupe enregistre un premier album, Somewhere Soon (voire ci-dessous), publié en 1990. Puis un second, avant de splitter en 1993. Et de se reformer des années plus tard, en 2015. Depuis, pas grand-chose, sinon un disque baptisé The Martin Hannett Sessions en 2020 qui permet d'entendre leurs premières démos inédites passées à la toile émeri du prestigieux producteur de Joy Division et New Order, disparu en 1991. Un bail, quoi...
... ET IL EST COMMENT CE DISQUE ?
Le genre de pépite que vous n'avez pas envie de laisser au fond de votre poche, mais de montrer à vos meilleur(e)s ami(e)s. Qu'ils/elles la touchent, la caressent, la soupèsent, la goûtent même. Bon, comme il s'agit d'un album, vous voudriez juste qu'ils/elles soient posé(e)s, tranquilles, pour accueillir cette musique qui pourrait être le chaînon manquant entre The La's et les Stone Roses, ou un avant-goût des Doves. Dix morceaux qui sont comme des petits tableaux de maîtres, du Da Vinci pour la finesse des traits ou plutôt du Van Gogh pour la mélancolie tragique qui s'en dégagent. Avec, pour moi (mais ce n'est que pour moi !), un coup de cœur pour So I Can See, une sorte de féérie suspendue. A chaque fois que je l'entends, j'ai envie de retomber amoureux avec le secret espoir que ce morceau devienne la bande son de cette nouvelle idylle. Le titre qui suit, Minor Turn, donne l'impression de prolonger So I Can See jusqu'à en épuiser, étirer sa beauté. Mais ce ne sont là que deux des petits trésors de cet album qui en contient bien d'autres, à commencer par Box Set Go (produit par Hannett) qui ouvre le disque en fanfare, carillonnant. Un peu plus loin, This Is My World, m'évoque à la fois The Dream Academy et Oasis. Un sens de la morgue, genre menton en avant ("Tu me cherches, connard ?") que des arpèges de guitare viennent tamiser, adoucir, rendre civilisé. Il se murmure d'ailleurs que Liam Gallagher aurait fait des essais à la basse dans la première mouture de The High. Reste un album qui pourrait vous faire son effet, et même devenir votre meilleur ami pendant un sacré bout de temps. Si jamais vous osez lui prêter une oreille.
Frédérick Rapilly
Cote d'amour = 90 %
Pop. Somewhere Soon (London Records). Le disque est difficile à trouver, sauf d’occasion, mais il est disponible avec un inédit sur Deezer, Spotify, etc…