CHRONIQUE (2020). Le britannique, fondateur du projet The Third Eye Foundation signe sous son prénom et son nom la bande son idéale sous influence Leonard Cohen pour patienter en toute quiétude, version disciple du zen ou du taï shi, avant que le monde ne s’écroule. Et il est en tournée en France, et en Belgique.
La voix ou plutôt la voix de l’apaisement… On a tous fantasmé sur ces pratiquants de taï shi se déplaçant lentement, en harmonie, bougeant leurs bras, leurs mains, leurs jambes, leurs pieds avec une grâce parfois infinie. On a tous fantasmé dessus, en s’imaginant les milliers d’heures de pratique, de gestes répétés avant d’arriver à une sorte de perfection. Et bien, c’est un peu l’effet que produit l’écoute de ce Farewell To All We Know de Matt Elliott. Comme si le musicien britannique, guitariste et chanteur, avait atteint une sorte de plénitude dans la pratique de son art. Et comme par hasard, la voix basse, grave, profonde et habitée de l’ex Third Eye Foundation (8 albums) qui assume désormais son identité en solo le rapproche de façon étonnante d’un autre musicien (disparu récemment) : le canadien Leonard Cohen, aussi moine bouddhiste de son vivant, adepte du zen. C’est flagrant dès le 2èmetitre de ce nouveau disque, qui porte d’ailleurs le même que celui de l’album, le bien nommé Farewell To All We Know. Et plus encore sur le morceau suivant, The Day After That, sorte d’incantation caressante à on ne sait quel(s) esprit(s). Pourtant, l’anglais « confesse » mal connaître le poète chanteur canadien, plus familier du répertoire de Nick Drake, Tom Waits ou encore Jeff Buckley. Peu importe… A chaque fois, la voix de Matt ondoie, louvoie, se fait caresse, enveloppe l’auditeur comme celle d’un marchand de sable qui souhaiterait vous entraîner dans un pays des rêves un peu cotonneux, symbiotique. Cela pourrait virer à une ambiance de fin du monde, crépusculaire comme l’on dit parfois (où sont les zombies ?), mais l’album reste sur ce fin ténu, toujours à la limite des songes. Bye now, cinquième titre du disque, en est un peu l’exemple avec son piano discret, un peu désuet. La chanson semble cheminer, lambiner, prendre des sentiers de traverse mais avance petit à petit. Pas d’épiphanie, de refrain à reprendre à tue-tête mais une sensation de bien, de mieux. Le tout dans un quasi dénuement. Beau, juste beau. Le genre de bande son idéale donc pour accompagner votre ultime séance de taï shi quelques secondes avant que le souffle de la dernière explosion nucléaire, ou le choc d’un météorite géante, ne vienne annihiler toute vie sur Terre, et donc vous même à cette occasion. Aplati donc, mais apaisé. Si jamais, ce Matt Elliott passe près de chez vous, allez-y et laissez-vous submerger. Promis, en vrai, il n’y a pas de danger. Ou presque !
Frédérick Rapilly
FOLK/ELECTRONICA. Farewell To All We Know, Ici d’Ailleurs, 12,99 E (9,99 E en mp3)
Cote d’amour = 90 %
En tournée à travers la France, et en Belgique (Lille, le 8 octobre / Toulouse, le 15 / Paris le 12 novembre / Bruxelles le 10 décembre)