CONCERT (2019). Malade, et malgré des micro-soucis de voix sur la toute fin, Neil Hannon assure un show joyeusement déjanté. Ou comment mélanger dans le même concert les Monty Pythons, Depeche Mode, Iggy Pop et la crème de la pop...
The Divine Comedy à la salle Pleyel, c'est quoi ? Et bien, ce sont sur scène cinq musiciens en noir et blanc, vaguement habillés en costumes d'employés de bureaux. Un guitariste et un bassiste côté droit (vu depuis la salle), un batteur au milieu, et deux claviers côté gauche. Avec une grosse horloge au-dessus de leurs têtes. Tout de rouge vêtu, un rouge tirant sur le orange, le ludion Neil Hannon déboule, joue les robots sur un premier titre qui met d'emblée la salle en joie. Idem avec le deuxième. Et quand le vrai-faux dandy Irlandais entame son hymne Generation Sex, c'est carrément l'orgasme... Ou presque. Ne chipotons pas ! Neil a l'air de s'amuser et le fait le savoir. Déjà conquis d'avance, les spectateurs de Pleyel sont assis (pas tous !), mais ravis. Et ceux devant se dressent un peu plus sur leurs ergots pour faire signe à leur "idole." Sur l'electropoppesque Office Politicset son gimmick de synthé à la Kraftwerk, ses choeurs parfaitement idiots, on se prend à se demander comment une telle voix de crooner, quasi Iggy Poppienne, peut-elle bien sortir du corps de ce gringalet, 50 kilos tout mouillé ? Bon, c'est vrai qu'Iggy Pop doit en faire à peine 60 de son côté. L'enchaînement se fait, comme sur le disque, sur l'épatante Norman and Norma. Neil tente une première fois de lancer un clapping. Loupé. Puis une deuxième fois. Encore loupé. Les fans sont à contre-temps. Pas très grave. Avec la chanson derrière, mi romantique mi sarcastique, nous voilà presque dans un film des Monty Pythons. A l'aise, malgré ses tentatives de clappings pas vraiment suivis (question ésotérique : "Les spectateurs français ont-il le rythme dans la peau, ou manquent-ils de coordination gestuelle ?"), Neil balance une blague sur ses lunettes, lançant qu'il préfère avoir le public dans le flou ("... In the blur...") pour ne pas avoir trop peur. Accompagné de son gang, il entonne ensuite Come On Billy Bird tiré d'un album de 2004, à laquelle répond tout de suite "Opportunity" Knox... Changement d'ambiance. Sur le 11ème morceau, c'est comme si toute la puissance de Depeche Mode était convoqué sur la scène de Pleyel avec l'envoûtant et percutant Infernal Machines. Depeche Mode, ok... Mais un Depeche Mode en costumes de clowns qui feraient "Tirlipimpon" et tireraient la langue, emmené par un lutin dégingandé plutôt que par Dave Gahan. La puissance du morceau est aussitôt désamorcé par le côté electro lounge, très 007, de You'll Never Work In This Town Again. Le concert s'achève une demi-douzaine de titres plus tard en rappel avec un Neil encore vaillant mais dont la voix vacille un peu, sur un Tonight we fly, version acoustique avec sa garde rapproché. Un message en français, susurré par une voix féminine demande : "Comment se fait-il que tu sois si belle ?... Bonne nuit, tout le monde."
Verdict ? Le genre de concert qui vous donne envie de frétiller. Avec un vrai performer qui utilise tout, ses faiblesses et ses atouts, pour donner le type de spectacle qui ne laisse jamais indifférent.
Frédérick Rapilly